« Nous sommes au bon Dieu de Bretagne et au diable d'Anjou »

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Sous l'Ancien Régime, jurdictions provinciales et ecclésiastiques d'entrecroisent. Le territoire diocésain (pouvoir spirituel) ne suit quasiment jamais le territoire de la province (pouvoir temporel). En outre, des zones particulières appelées « marches » apparaissent sur les frontières entre provinces.

 

Dans les cantons limitrophes de Champtoceaux, Le Loroux-Bottereau, Vallet et, dans une moindre mesure, Montrevault, il y a de quoi perdre son latin. « Nous sommes au bon Dieu de Bretagne et au diable d'Anjou » clamaient avec humour les habitants des paroisses du diocèse de Nantes placées dans la province d'Anjou.
Avant le XIXe siècle, le généalogiste va donc difficilement reconnaître les environs et se perdre dans le découpage paroissial. Il faut avoir à l'esprit que certaines des communes actuelles furent des trêves de paroisses et les remaniements post-révolutionnaire ont brouillé la carte. La trêve (ou feuillette) était une succursale de paroisse.

L'imbroglio de La Remaudière, La Boissière, Saint-Christophe

ImageLa Boissière (actuelle Boissière-du-Doré) était une trêve de la paroisse de La Remaudière jusque sous l'épiscopat de Pierre Mauclerc, évêque de Nantes de 1746 à 1775, qui l'érigea en paroisse. Saint-Christophe (Saint-Christophe-la-Couperie) constituait une autre trêve de la Remaudière avant de devenir également paroisse en 1766. Ainsi les registres paroissiaux de La Remaudière contiennent des événements qui ont eu lieu à La Boissière ou Saint-Christophe. Lorsqu'ils ont lieu à la chapelle aux Moines on se trouve bien sur le territoire de l'actuelle Remaudière. Le caractère insolite de cet ensemble paroissial provient de sa situation géographique. La Remaudière et La Boissière se situaient sur les marches communes d'Anjou et de Bretagne jusqu'à la Révolution, mais dépendaient du diocèse de Nantes. Saint-Christophe quant à lui était un territoire angevin mais dépendait au spirituel du diocèse de Nantes (puisqu'étant une trêve de La Remaudière). A la création des départements en 1790, La Boissière est rattachée à la Loire-Inférieure comme la Remaudière. Saint-Christophe-la-Couperie est inclus dans le Maine-et-Loire, et le 6 juin 1802 passe du diocèse de Nantes à celui d'Angers. Enfin, en 1848 et durant tout le mandat de son maire Arthur BARBIER DU DORÉ, l'extension "du Doré" est ajouté au nom de la commune de La Boissière. On la retrouve en 1917 sur les registres d'état-civil. Par arrêté ministériel du 10 mai 1962, le nom de Boissière-du-Doré est définitivement adopté.

La Divatte : frontière ou pas ?

Dans ce secteur, la Divatte, rivière coulant entre La Remaudière et la Boissière est généralement admise comme frontière naturelle entre la Bretagne et l'Anjou. Au niveau temporel (comme évoqué précédemment), il s'agit d'une zone de marche. Or les cartographes de l'Ancien Régime, moins soucieux que nous de l'exactitude des informations, ont placés indifféremment La Remaudière et/ou La Boissière, en Anjou ou en Bretagne. L'Anjou s'étend même parfois largement dans le vignoble nantais. Avant la Révolution, hormis le découpage diocésain et provincial, on compte également des territoires jurdiques ou militaires. Souvent, aucun de ces découpages n'est superposable à l'autre. Bref, il assez difficile de définir une véritable frontière au sens où on l'entend aujourd'hui.

Vallet, La Chaussaire ou La Regrippière

Le prieuré de La Regrippière, fondé près du bourg originel d'Escoublant ou (Escouflant) par un ordre fontevriste, se situe sur la paroisse de Vallet. La Regrippière érigée en paroisse entre 1820 et 1821 devient commune en 1863 par un démembrement de la commune de Vallet. En 1891 une section du territoire de la commune de La Chaussaire (en Maine-et-Loire) lui est adjointe. Une partie du bourg de la Regrippière et quelques fermes proviennent de cette portion angevine.

La carte ci-dessous montre ce qu'était les diocèses de Nantes et d'Angers avant 1802 par rapport à la Bretagne et à l'Anjou d'avant 1790. J'ai montré les trêves par leurs limites en pointillé. On distingue les marches communes d'Anjou et de Bretagne (La Remaudière et La Boissière) et les marches avantagères à l'Anjou sur la Bretagne (canton de Champtoceaux + Le Fuilet). J'ai également fait ressortir les démembrements de Vallet et La Chaussaire qui ont donnés naissance à  la commune de La Regrippière.

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Le Loroux-Bottereau et Le Landreau, La Chapelle-Basse-Mer et Barbechat

Le 25 mars 1863 est décrété l'érection en commune du bourg du Landreau situé jusqu'alors sur le territoire du Loroux-Bottereau. La paroisse du même nom existait depuis le 6 janvier 1847. Le village de Barbechat rattaché en 1653 à La Chapelle-Basse-Mer, s'en sépare dès 1777. Barbechat devient commune par décret du 11 juillet 1868.

Landemont et Saint-Sauveur

Alors qu'en 1790 on assiste à la fusion des petites paroisses (ex : Saint-Martin et Notre-Dame de Beaupreau), voici un exemple d'éclatement. La trêve de Landemont devient la paroisse Saint-Sauveur-de-Landemont en 1802 puis commune en 1824.

Conclusion, si vous ne retrouvez pas d'événements sur La Boissière-du-Doré, Saint-Christophe-la-Couperie, Saint-Sauveur-de-Landemont, Barbechat, Le Landreau, La Regrippière ne soyez pas déçus, vous pouvez rechercher sur les registres de leur paroisse de rattachement qui parfois se trouve maintenant dans le département voisin. Heureusement la Loire-Atlantique et le Maine-et-Loire font partie de la première région de France dont l'ensmenble des archives départementales sont disponibles en ligne. Il suffira de quelques clics.

Commune actuelle (ancien nom) Trêve de : Province Diocèse avant 1802
Paroisse en : Commune en : Dpt. Début des registres
Barbechat La Chapelle-Basse-Mer Bretagne Nantes ? 1777 1868 44 1848
Champtoceaux   Anjou Nantes   1790 49 1527
Drain   Anjou Nantes   1790 49 1531
La Boissière-du-Doré (La Boissière) La Remaudière Bretagne et Anjou Nantes 1746/1775 1790 44 1657
La Chapelle-Basse-Mer (La Chapelle-Bassemere)   Bretagne Nantes   1790 44 1520
La Chaussaire   Anjou Angers   1790 49 1668
La Regrippière (Escoublant/Escouflant) Vallet* Bretagne Nantes 1820/1821 1863 44 1863
la Remaudière   Bretagne et Anjou Nantes   1790 44 1501
La Varenne (La Varenne-sous-Champtoceaux)   Anjou Nantes   1790 49 1669
Landemont   Anjou Nantes     49 1613
Le Fuilet   Anjou Nantes   1790 49 1539
Le Landreau Le Loroux-Bottereau Bretagne Nantes 1847 1863 44 1863
Liré   Anjou Nantes   1790 49 1620
Saint-Christophe-la-Couperie (Saint-Christophe) La Remaudière Anjou Nantes 1766 1790 49 1692
Saint-Laurent-des-Autels   Anjou Nantes   1790 49 1677
Saint-Sauveur-de-Landemont (Saint-Sauveur) Landemont Anjou Nantes 1802 1824 49 1825

*Pour la Regrippière, plutôt que de trêve, on parlera de dépendance de Vallet.

3 commentaires

  • 8) Mise à jour fort utile et qui devrait me servir lorsque je mettrai à jour la généalogie de Gilles, dont la famille paternelle est originaire du Fuilet en passant par les Mauges.
    Le découpage départemental se fait sur une frontière naturelle, le ruisseau de la Divatte qui se jette dans la loire.
    • Heureux de savoir que cet article va pouvoir t'être utile dans tes recherches. Effectivement le secteur compte beaucoup de Courbet. En revanche, je dois rectifier un point. La Divatte était la frontière naturelle entre l'Anjou (rive droite) et La Bretagne (rive gauche), mais depuis 1790, son cours ne coïncide plus avec le découpage départemental car la Boissière-du-Doré (en rive droite de la Divatte) dépend de la Loire-Atlantique.
  • Dans l'acte de baptême de François MOREAU, le 28/12/1688 au Fuilet on trouve comme parrain Fabien MOREAU "de la paroisse de la boissiere du doré". Voilà qui infirme sérieusement l'hypothèse soutenant que le suffixe "du Doré" provient du nom d'un des maires de la commune. La Boissière-du-Doré portait son nom actuel bien avant le mandat de M. BARBIER du DORÉ.

    Merci Annelle.

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